A la claire fontaine... [libre... Carlisle, ce serait sympa]

24 novembre 1789. L'atmosphère était lourde en Italie comme partout en Europe. Depuis que les Français s'étaient révoltés et avaient renversé la royauté, que dis-je, la monarchie absolue de droit divin, il y avait une tension permanente qui faisait vibrer l'air et la vie en général d'une drôle de manière. Les gens avaient compris que le pouvoir n'était pas une chose naturelle, décidée par le Ciel.
Ce soir, dans les rues de Florence, il régnait cette effervescence propre à une ville qui ne demandait qu'à prendre son envol, après un essor culturel et artistique indéniable, il ne manquait plus que la liberté de chacun pour que le petit peuple se mette en rogne et tente de renverser l'aristocratie établie...

Eleazar était appuyé contre le balcon. Il regardait d'un oeil aiguisé la foule qui se massait vers les portes de la ville. Cette foule qui lui donnait soif et éveillait en lui bien des pulsions qu'il se devait de refréner pour ne pas trahir le clan des Volturi. En observant les humains, Denali songeait que lui aussi, un jour, aurait une bâtisse imposante avec vue sur l'humanité et qu'il pourrait se servir d'hémoglobine humaine à sa guise, sans avoir à mesurer quoi que ce fût de ses envies.
En général, c'était en balayant ainsi des yeux la foule que le vampire repérait une proie. Il préférait de loin les jeunes femmes aux courbes alléchantes. Il se faisait un plaisir de les séduire pour en profiter pleinement avant de les mordre. Il se plaisait à songer qu'ainsi, il leur apportait au moins autant de plaisir qu'elles.

C'était elle qu'il voulait. La cuisse ferme et le sein arrogant, une jeune femme aux cheveux noirs et ondulés marchait d'un bon pas. Eleazar respira l'air que lui envoyait le vent, un air plein de la fragrance subtile de la jeune femme. Elle devait être délicieuse... Déjà, il s'imaginait badinant avec elle au coin d'une ruelle. Maintenant qu'il avait senti son parfum, il la retrouverait. Partout. Sans problème.

La silhouette féminine et gracieuse passa près de la fontaine. Eleazar la vit même s'y asseoir un moment. Mais l'heure n'était pas encore à la chasse. La main qui se posa sur l'épaule du garde des Volturi le lui fit bien vite comprendre...

Carlisle, vampire depuis un peu plus d'un siècle, se trouvait en Italie. Ce 24 novembre 1789.
Depuis sa création en tant que vampire, Carlisle avait beaucoup voyagé. Avant sa période en solitaire.
Il avait parcourut une partie de l'Europe. Il avait fait un tour en France avant d'arriver ici, en Italie. Il s'était retrouvé chez les Volturi, chez lesquelles, il venait d'arriver. Ils ne les connaissaient depuis que quelques mois seulement. Mais savait déjà beaucoup de chose sur eux. Ayant rencontrés d'autres vampires lors de ses voyages, il avait appris de nombreuses choses sur les Volturi.

Carlisle n'était pas encore très sur de lui. Le sang humain le torturait. Il ne supportait pas l'idée de tuer des humains et de s'en nourrir. Il faisait de son mieux pour se contenir. Mais... C'était vraiment dur.

Carlisle était donc en Italie depuis quelques mois seulement. Il marchait tranquillement, dans les rues de Florence, réfléchissant. Il avait des projets, du moins un : Devenir médecin. Il avait appris de nombreuses choses sur la médecine, lors de ses multiples voyages, à travers le monde entier. En particulier l'Europe.
Il voulait tellement se contrôler... Et surtout aider les gens.

Il était arrivé au niveau de la fontaine. Plusieurs personnes humaines autour. Il les reconnaissaient car toutes avait l'odeur du sang. Toute ? Non. Une n'avait pas l'odeur du sang humain... Un homme. Plutôt un vampire.
Il reconnu le garde des Volturi, qu'il n'avait qu'aperçu lorsqu'il c'était présenté au Volturi.
Il le regardait attentivement. Et Carlisle eu un préssentiment. Cet homme regardait avec envie cette femme, humaine, en face de lui, assise à côté de la fontaine.
C'était comme si, Carlisle comprenait ce qu'il avait dans sa tête.
Il s'approcha donc de l'homme, et posa une main sur son épaule.

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

[Admin qui s'inscruste en PNJ joue la jeune fille aux cheveux noirs ondulés^^]

Cette journée n'aurait pu être pire pour Morgane. La jeune londonienne était en voyage en Italie, avec son père afin d'apprendre la langue. Mais ce n'était pas de tout repos. D'abord, il y avait sa famille qui lui manquait. Terriblement. Sa mère, son petit frère et son fiancé, laissés à Londres pour les quelques mois qui venaient. Mais c'était insupportable d'être aussi loin d'eux. Et le courrier ne comblait pas le vide qu'ils provoquaient. Loin de là! Puis ce travail était très très fastidieux...

En sortant de la demeure où elle logeait, Morgane avait détachée ses longs cheveux noirs. Le chignon qu'elle avait serré autour de sa tête les avait rendu ondulés. Plus que de coutume d'ailleurs. Peut être était-ce la raison de sa migraine d'ailleurs? La jeune femme marchait dans les rues de Florence. La nuit était tombée, il faisait lourd, très lourd. Des gouttes de sueur commencèrent à perler sur ses épaules, et elle décida donc d'ôter le petit voile qui couvrait ses épaules. Qu'il était agréable de marcher dans cette ville.

Morgane se trouva près de l'une des fontaines de la ville. Elle s'en approcha d'un pas vif et s'assit sur son rebord, perdue dans ses pensées. Il fallait encore qu'elle traduise un vieux poème de Pétrarque pour demain... Que ne fallait-il pas faire pour plaire à son père?

Et pourquoi diable cette chaleur était-elle aussi assommante?

La chaleur était étouffante en ce début de soirée et l'odeur des gens en était particulièrement renforcée, ce qui n'était pas pour déplaire à Denali... Que du contraire ! il y avait dans toutes ces effluves mêlées un petit quelque chose de terriblement attirant. Même le gros marchand de vin, celui qui suait comme un boeuf, fleurait bon et attisait encore la soif d'Eleazar. Et cette jolie jeune femme surpassait tout. Son parfum aurait très bien pu porter le nom de "Tentation", cela n'aurait certainement pas étonné le vampire... Subtil, fruité et chaleureux, tel était-il, ce parfum... et Eleazar le savourait tout en réfléchissant à la meilleure solution pour arriver à ses fins. Mais la main sur son épaule était un contretemps... presque un obstacle, pourrait-on dire.

Les prunelles de Denali étaient noires de soif et le fait qu'une main pâle se soit posée sur son corps provoqua en lui une vague de frustration. Se retournant lentement vers le propriétaire de la main et plissant les yeux, Eleazar toisa l'autre. Un vampire. Assurément. Un humain n'aurait jamais eu la peau si pâle et une telle odeur. Les cheveux blonds de ce type lui rappelait quelque chose, mais Eleazar n'avais jamais su le nom de ce vampire qui avait vécu quelque temps avec les Volturi. La silhouette n'était donc pas tout à fait méconnue et le garde des Volturi se souvenait tout de même de l'avoir vue plusieurs fois déjà.

"Vous désirez ?"

Eleazar avait adopté une attitude nonchalante et un air légèrement provocateur.Qui que puisse être ce vampire, Denali avait flairé et repéré une proie... un morceau de choix qui éveillait tous ses sens...

Carlisle regarda attentivement le garde des Volturi. En vérité pas longtemps. Il n'eut besoin que d'une seconde à peine pour comprendre ce qui se passait.
Eleazar avait choisi cette femme comme proie, il la voulait. Il était vrai que cette femme sentait bon, que son sang devait être délicieux... Carlisle lui même le sentait et été tenté. Mais pas ce n'était pas à ce point là.
Carlisle ne voulait pas tuer, il essayait de prendre sur lui, de combattre cette soif.

Il fixait Eleazar, le garde des Volturi qu'il avait croisé quelques fois.

- Vous ne devriez pas.

Lui dit il tout simplement. Espérant qu'il comprenne. Carlisle se doutait qu'il comprenait.
Eleazar, étant garde des Volturi, était intelligent. Et en savait surement plus que Carlisle. Il avait l'air, en plus de ça, plus vieux que lui.
Et puis, ces simples paroles disaient tout.

Carlisle retira sa main qu'il avait posé sur l'épaule du garde des Volturi, ne cessant pas pour autant de le regarder.

Il y a plusieurs choses à savoir pour pouvoir obtenir ce que l’on mérite. La première, c’est de rester égal à soi-même. L’intervention du vampire blond était, certes, pleine de bon sens, de respect et de tout ce que l’on veut, mais Eleazar avait soif. Et la soif, chacun le sait, chez n’importe quel vampire se doit d’être calmée pour que toute discussion éthique, philosophique ou autre puisse se dérouler correctement. Les quatre mots de l’intervenant étaient donc véritablement futiles aux yeux de Denali. Retroussant les lèvres, le garde des Volturi fronça les sourcils avant de lancer, l’air le plus badin possible, son accent espagnol reprenant quelque peu le dessus suite à la tension latente qui l’habitait :

"Señor, vous êtes un idéaliste… Je ne pense pas me tromper en vous trouvant courageux, mais je crois que vous ne vivrez pas heureux en pensant et en agissant comme cela. Comment voulez-vous arriver à quoi que ce soit si vous bridez vos besoins les plus élémentaires ?"

Le garde avait l’œil perçant et il lui parut évident que son interlocuteur n’avait pas dû prendre un bon et vrai « repas » depuis un moment. Les cernes sous les globes oculaires du blond ne trompaient pas.
Eleazar jeta un regard furtif vers la jeune femme à la chevelure d’ébène et le parfum de celle-ci lui parvint, toujours plus envoûtant, comme s’il l’appelait expressément, le tentait, jusqu’à le pousser dans ses moindres retranchements, peut-être…

"Elle est belle, elle est seule. Soyez certain qu’elle n’aura pas à souffrir…"

Après un sourire-éclair, Denali tourna de nouveau le dos au vampire blond pour se diriger vers la jolie femme près de la fontaine. Les mots de l’autre, il les gardait quelque part dans son crâne, c’était une évidence, mais il ne comptait pas les en sortir tout de suite…
Prenant un air las, il s’assit à moins d’un mètre de celle qu’il avait repérée. Il fallait qu’il ait l’air détaché et serein… Peut-être même pouvait-il feindre de s’intéresser à quelques pages de ce livre qu’il gardait en poche par plaisir ?

Sortant l’ouvrage et croisant les jambes, Eleazar ouvrit l’ouvrage, le célèbre « Canzoniere » de l’inventeur du sonnet, Pétrarque… Denali appréciait ces mots à Laure dont la beauté ne laissait aucun doute… Peut-être même avait-elle été aussi attirante que sa voisine de l’instant… Et puis, soit. Il décida de se lancer, feignant à présent de réfléchir à voix basse mais audible pour la nymphe près de lui.

"Ces vers de vie et de mort… Comment a-t-il pu oser traduire en poésie un désir si humain ? surtout à l’époque… « Rime in morte di Madonna Laura »… c’est tellement plus conforme… "

Les paroles du vampire étaient marmonnées, mais suffisamment articulées pour être comprises. Il le savait. Et les personnes normales ne laissaient pas quelqu’un parler seul sans lui demander s’il s’adressait à elles ou s’il se sentait mal. C’était ainsi et cela n’avait pas changé en plusieurs siècles, alors pourquoi maintenant ?

Carlisle ne pouvait en faire plus. Le garde des Volturi avait soif. Et Carlisle ne pouvait pas l'empêcher de s'en prendre à cette femme.
Il détestait cette situation. Il se sentait impuissant face à ça. Lui qui faisait tant d'efforts... Pourquoi les autres ne suivait pas son exemple ? Cela sauverait des vies.
Mais les vampires avait besoin de s'alimenter. Ils ne pouvaient pas rester indéfiniment sans boire du sang.

Cela faisait déjà plusieurs semaines que Carlisle n'avait pas bu et ça se voyait. Ses cernes ne trompaient pas.
Malgré qu'il soit contre qu'on se prenne aux humains, il comprenait Eleazar dans un sens. Il savait très bien que c'était dur de résister à une telle tentation de sang humain.

Eleazar était prêt de la femme à présent. Un livre ouvert dans ses mains.
Carlisle décida d'aller s'assoir prêt d'Eleazar. Tentant une dernière manoeuvre. Un autre banc était à deux mètres d'où était le garde et la jeune femme. Carlisle alla s'y asseoir. Sachant très bien que même en parlant à voix basse, le garde des Volturi allait l'entendre :

- Elle est belle et attirante, vous l'avez dit. Justement, ne croyez vous pas qu'elle mérite de vivre ?

Dit il à voix basse. Personne ne pouvait l'entendre, à part Eleazar. Et les paroles de Carlisle n'était pas fausses. Au contraire, il avait raison. Cette femme était trop belle pour qu'on la tue. Elle méritait de vivre, elle avait surement une famille derrière elle. Une maison, des enfants, un mari...

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

La chaleur donnait à Morgane un léger vertige. Elle ferma les yeux un moment pour se ressaisir, laissant ses mains s'appuyer sur la fontaine derrière son dos. La jeune femme se laissa envahir par l'air chaud, l'inspirant profondément dans ses poumons. En le rejetant, elle rouvrit les yeux. Quelle heure était-il? Elle n'en avait aucune idée. Et même s'il était certainement plus sage de rentrer, Morgane n'en avait aucun envie, non. Affronter les perles de sueur qui coulaient sur sa nuque semblait un combat plus équilibré que ce qui l'attendait chez elle.

"Ces vers de vie et de mort… Comment a-t-il pu oser traduire en poésie un désir si humain ? surtout à l’époque… « Rime in morte di Madonna Laura »… c’est tellement plus conforme… "

Morgane fut parcourue d'un frisson. Ses yeux papillonnèrent seuls sur sa gauche. A quel moment cette personne s'était-elle assise là, juste à côté d'elle? Elle tourna alors son visage vers cette soudaine silhouette et posa son regard sur un homme au visage étonnant. D'une extrême pâleur, les traits parfaits, mais graves comme s'il était tourmenté. Elle ne distinguait pas la couleur de ses yeux dans cette obscurité nocturne, mais ils lui semblaient lointains.
Le regard de Morgane tomba, se laissant à observer le livre que l'homme inconnu tenait dans ses mains. Le "Canzionere". Elle ne s'était donc pas trompée. Replongeant ses yeux sur l'admirable visage de cet homme, Morgane esquissa un léger sourire tout en rougissant de son indélicatesse. S'était-il rendu compte qu'elle était là? Assise près de lui en se prélassant près de la fontaine. C'était peu probable. Il n'avait pas parlé d'une voix forte, il avait murmuré cela pour lui même c'était certain, mais s'il s'était aperçu qu'il n'était pas seul, il aurait garder sa réflexion pour lui.
Le rouge de ses joues devint plus intense lorsqu'elle se rendit compte qu'elle le dévisageait toujours. Détournant le regard sur ses mains, qui à présent étaient posées sur ses genoux, elle ne put retenir ces paroles:

Elle releva les yeux vers le ciel cette fois, regardant la lueur des étoiles.

Elle sourit et laissa retomber son visage, regard vers le sol.

Les choses étant ce qu'elles étaient, Eleazar s'était assis et avait tenté une approche informelle et distante, à la manière que l'on employait quand on désirait un interlocuteur - ou, a fortiori une interlocutrice - en particulier.
Et voilà que l'autre, le blond, venait se mettre face à lui, un peu loin, certes, mais suffisamment proche pour que l'ouïe aiguisée d'un vampire quel qu'il soit puisse entendre ses mots. Des mots qui firent sourire le garde des Volturi, évidemment.Il lui répondit donc de la même manière que l'autre s'était adressé à lui, mais les yeux toujours rivés à son exemplaire du Canzoniere.

"Vivre ou mourir... quelle importance ? Sa beauté est sa seule richesse, avec celle que lui confère son sang. Ne soyez pas mauvais joueur, je l'ai vue avant vous, vous ne l'aurez pas."

Si l'autre vampire désirait sa proie, Denali était prêt à agir en conséquence. Elle était pour lui. Déjà, il se l'était appropriée, avait prévu tout un cheminement d'approche et une stratégie d'attaque post-séduction. Oui, il l'aurait.
Consciencieusement plongé dans son livre, Eleazar respirait doucement, savourant à l'avance le parfum de la jeune femme et imaginant déjà la délicatesse de sa peau entre ses dents, de son cou tendre et offert et du moment de pur plaisir que tout cela lui procurerait.
Il la voulait et son interlocuteur n'avait pas d'influence sur lui. Il était évident pour Denali que l'autre voulait lui piquer sa proie sous son nez, rien de plus.

Alors il entendit murmurer des vers de Pétrarque et il prit tout son temps pour se tourner vers la délicieuse voix féminine qui s'était fait entendre. Il attendit qu'elle en ait terminé et qu'elle donne son avis pour lui parler à son tour...

"Toute traduction est une trahison, mademoiselle... Mais c'est parfois indispensable pour rendre accessible la culture à chacun...
J'admire l'audace de Pétrarque, il a osé tellement à une époque où rien n'était certain..."

- Vous vous tromper. Je ne la veut pas.

Alors c'était ce que pensait Eleazar ? Que Carlisle voulait lui piquer sa proie ?
C'est qu'il se trompait sérieusement. Carlisle était lui aussi, attiré par l'odeur de cette jeune femme, mais il n'avait aucune intention de la tuer, de boire son sang.
Il ne faisait pas tous ses efforts pour rien, par pour flancher au dernier moment, si près du but qu'il essayait d'atteindre.

- Elle est très belle oui. Et elle sent vraiment très bon. Mais ce n'est pas ma proie.
Je ne veux pas la tuer. Je ne veux pas boire son sang. Elle est trop belle, trop intelligente et cultivée pour mourrir.
Je préfère m'abstenir et vous devriez en faire autant. Réfléchissez.

Le vampire blond parlait toujours à voix basse.
Il essayait juste de l'empêcher de tuer cette femme, qui était très belle. Qui était intelligente et cultivée. Il le sentait. Cette femme répondait avec grâce et culture à Eleazar.

Carlisle savait que ce vampire était intelligent. Sinon, les Volturi ne l'aurait pas prit comme garde.

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

"Toute traduction est une trahison, mademoiselle... Mais c'est parfois indispensable pour rendre accessible la culture à chacun...
J'admire l'audace de Pétrarque, il a osé tellement à une époque où rien n'était certain..."

Il avait levé les yeux vers elle, et Morgane resta un long moment plongée dans leur profondeur. Elle émit un léger rire à ces dernières paroles. Il s'aventurait sur un terrain qu'elle connaissait par cœur. L'objet même de sa venue ici. Mais si l'immortel "Canzoniere" n'avait pas de secret pour elle, les yeux qui la regardaient en étaient remplis. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle se sentait irrévocablement attiré par cet homme lettré. Elle éprouvait une certaine fascination face à lui, fascination qu'elle n'expliquait pas. Elle ne le connaissait pas, ne l'avait jamais vu, et pourtant elle voulait parler avec cet homme qui semblait aimer la littérature presque autant qu'elle, cet homme qui n'avait aucun lien avec son père dans cette ville.

Elle ne l'avait pas quitté des yeux. Eblouie par tant de beauté, ensorcelée par sa voix de velours... Qui pouvait bien être cet inconnu? Il n'était pas italien, c'était certain... Un voyageur? Cela ne l'étonnerait pas et il avait sur son visage cet air qu'ont les hommes intellectuels de cette fin de siècle. Sa curiosité la poussa à poser une question bien indiscrète.

Morgane avait de plus en plus chaud, mais ces yeux-là la faisaient frissonner. Ses mains moites se tortillaient l'une dans l'autre pendant que sa respiration se faisait plus difficile...

Ainsi il ne la voulait pas? Tant mieux. Cela allait simplifier grandement les choses. Eleazar n'avait guère envie de se battre pour une proie, même si celle-ci en valait la peine. Cependant, les paroles du blond n'étaient pas vraiment normales. Pas aux yeux du garde, en tout cas. Que voulait-il dire précisément? Depuis quand la beauté, l'intelligence et la culture empêchaient-elles quelqu'un de mourir? C'était complètement idiot comme réflexion... Denali, lui dit dans un souffle :

"Vous êtes étrange. Vous savez comme moi à quel point il est difficile de réfléchir le ventre vide... Pourquoi défendez-vous cette humaine?"

Ayant dit cela, il avait plongé son regard dans celui de la jeune femme sise à son côté. Il la subjuguait, évidemment. C'était toujours comme cela. La nature était bien faite et les prédateurs avaient en eux certains atouts indéniables qui poussaient presque les proies à venir d'elles-mêmes. Les avantages de la bêtise humaine, sans aucun doute. Mais, en parlant de bêtise, il semblait à Denali que cette humaine-là en était plus dépourvue que la grande majorité. Outre les adjectifs "jeune" et "belle", vint donc s'imposer à l'esprit du vampire celui de "cultivée" pour qualifier cette gracieuse demoiselle.
Elle se perdait dans ses yeux et il le savait. Il le sentait. Et c'était toujours ainsi que cela se passait. Les intonations de la voix de la femme avaient cette succulence toute délicate des jeunes filles bien éduquées qui ne manquaient jamais une occasion de se montrer respectables. En société du moins. Car les libertines n'étaient pas tellement rares dans le lot.

Soit. Voilà qu'elle parlait d'amour, sans le quitter des yeux. C'en était presque touchant. Du moins, cela aurait sans doute touché un humain. Mais pas un vampire et encore moins quelqu'un comme Eleazar !

"Ce n'est pas faux et j'aurais tendance à adopter ce point de vue, moi aussi, mais j'aime trop la discussion pour la clore de la sorte... Vous parlez d'amour comme d'un don, mais n'oubliez pas que "Passion" vient du latin pour "Souffrir"... N'est-ce pas là terriblement paradoxal ?"

Amour et souffrance... ou même "amor et à mort"... Les sonorités avaient tellement à révéler, elles aussi ! Comme l'accent de cette demoiselle, par exemple, qui indiquait qu'elle n'était pas de la région... pas même du pays... Eleazar saisit la perche qu'elle lui tendait pour faire "plus ample connaissance" pourrait-on dire.

"Je ne suis pas plus italien que vous, señorita... Je me nomme Eleazar Denali et suis espagnol, fervent lecteur de Pétrarque, ainsi que de Dante Alighieri et de Boccace... mais aussi de Cervantes et de Calderón de la Barca de Henao y Riaño.
Mais en face de qui ai-je donc l'honneur de me trouver ?"

La démarche était simple. Eleazar aimait repérer les goûts de ses proies pour mieux les piéger. Il fit mine de se pencher pour un baisemain à cette délicate demoiselle qui ne tarderait sans doute pas à lui en dire un peu plus sur elle et il jeta un furtif regard au vampire blond, se demandant toujours où il avait voulu en venir exactement.

Pourquoi ne pas laisser en vie les personnes qui en valent la peine ? Qui mérite de vivre ? Pourquoi ce sont toujours eux qu'on tue pour leur sang ? Pourquoi pas les truands, les tueurs qui mérite de se faire mordre et torturer par des vampires ?
Carlisle s'en posait des questions. Et essayait de comprendre.
Certes, le sang de cette femme était attirant, mais rien que sa beauté empêchait Carlisle de la tuer pour boire son sang.
Cette femme, comme tout autre femme ou même homme, avait le droit de vivre. Leur vie était déjà assez courte comme ça. Les vampires eux, avait l'éternité et ils ne ce rendaient pas compte du temps de vie des humains.

Carlisle écoutait Eleazar et la jeune femme parler. Jusqu'a ce que le garde des Volturi lui jette un regard furtif. Voulant savoir où il voulait en venir.
Carlisle reprit donc la parole, toujours de cette même voix, basse.

- Je la défend comme tout autre humain. Je n'aime pas tuer les gens pour boire leur sang.
Je sais que c'est dur, qu'elle est plus que belle et que son sang est très attirant.
Mais je serais à votre place, je la laisserais en vie.

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

"Ce n'est pas faux et j'aurais tendance à adopter ce point de vue, moi aussi, mais j'aime trop la discussion pour la clore de la sorte... Vous parlez d'amour comme d'un don, mais n'oubliez pas que "Passion" vient du latin pour "Souffrir"... N'est-ce pas là terriblement paradoxal ?"

Morgane esquissa un sourire. Sa vision de l'amour était naïve et elle le savait. Mais après tout, qu'est-ce qu'une jeune fille bien élevée soumise à un mariage de convenance pouvait réellement savoir du monde des sentiments? Mais si l'on devait parler de "Pathos" à présent, elle savait qu'elle l'endurerait auprès de son fiancé londonien. William était un homme bon soit. Mais Morgane était une femme de lettres... Influencée par le théâtre shakespearien et cornélien.

Pourquoi diable fallait-il que la voix de cet homme soit si séduisante? Mais qu'arrivait-il donc à Morgane? Elle ne savait vraiment pas où donner de la tête. D'ailleurs celle-ci continuait de lui infliger un léger vertige à cause de la chaleur. A moins que c'était à cause de cet homme... Elle ne parvenait pas à détourner le regard de ses yeux si vifs, si pénétrants. Elle ne voyait rien d'autre que ces deux lueurs-là qui la fixaient elle.

La jeune femme se sentait gênée de la question si directe qu'elle avait posé. Cela ne lui ressemblait pas d'être aussi impolie. Pourtant, cet homme ne sembla pas dérangé le moins du monde par sa question et y répondit de bonne grâce tout en la regardant, ne la quittant pas des yeux...

"Je ne suis pas plus italien que vous, señorita... Je me nomme Eleazar Denali et suis espagnol, fervent lecteur de Pétrarque, ainsi que de Dante Alighieri et de Boccace... mais aussi de Cervantes et de Calderón de la Barca de Henao y Riaño.
Mais en face de qui ai-je donc l'honneur de me trouver ?"

Ainsi, il n'était pas de ce pays, tout comme elle. Morgane n'était donc pas la seule étrangère ici-bas. Une pensée assez réconfortante, il fallait l'admettre. Elle savait pertinemment que Florence était envahie par des étrangers, qui comme elle étaient envahis par un profond sentiment de curiosité, mais la jeune femme se sentait abominablement seule dans ces rues. Et voilà qu'elle avait en face d'elle un homme qui avait les mêmes goûts prononcés pour la littérature qu'elle.

- Morgane Peterson... Je suis londonienne. Et fidèle lectrice de Pétrarque, de ses deux héritiers français Ronsard et Du Bellay, du dramaturge anglais Shakespeare, des dilemmes cornéliens et des tragédies racinienne... Parmi d'autres...

Bon. De deux choses l'une. Soit ce vampire blond était complètement timbré, soit il était tellement idéaliste que même Thomas More pouvait aller se rhabiller. Mais en un sens comme dans l'autre, Eleazar devait reconnaître que l'attitude de cet autre vampire l'intriguait. Durant tous les siècles qu'il avait traversés, jamais il n'avait rencontré d'êtres de même nature que lui qui refusaient de tuer des humains pour boire leur sang. Denali se promit de percer ce mystère dans un futur plus ou moins proche. Avant cela, il y avait plus urgent à ses yeux. Cependant, le garde des Volturi esquissa un léger sourire à l'attention du blond, avant de murmurer :

"Qui vous dit que je veux juste la tuer?"

Ces paroles, il les avait volontairement voulues tangentes, pleines de sous-entendus. Evidemment, elle était belle, sa proie, sinon, il ne l'aurait pas approchée de cette manière ! Et bien sûr, que son parfum était si délicat et subtil qu'il était difficile de s'en détacher... mais Eleazar aimait trop s'amuser un peu avant de se rassasier.

Les attitudes qu'adoptait tour à tour la jeune fille avec qui il parlait étaient elles aussi sensiblement appétissantes. Cette gêne mêlée d'admiration, ce regard intéressé et un peu étonné, ce visage tellement doux... Elle avait beaucoup d'atouts aux yeux du vampire et il se surprit à songer que, s'il l'avait connue quelques siècles plus tôt, il aurait volontiers tenté d'en faire autre chose qu'une simple proie.
Peut-être que le blond avait en partie raison, que cette demoiselle valait bien trop pour mourir maintenant? Mais quelle mort plus succulente aurait-elle pu avoir?

Petit à petit, la lourdeur de la température amenait l'odeur de la jeune femme à essaimer plus encore ses fragrances attirantes. Eleazar la sentait devenir aussi un peu plus confiante. C'était toujours réellement plaisant de constater ce petit changement. Les humains étaient tellement prévisibles...

Morgane. Morgane Peterson. Ces patronymes anglo-saxons avaient déjà une saveur sucrée dans l'esprit du vampire... Elle devait vraiment être délicieuse, cette adepte de la littérature... Denali appréciait le badinage (artistique lol) et il n'hésita pas à adresser à la demoiselle quelques paroles.

"C'est un plaisir de faire votre connaissance, mademoiselle Peterson."

Les noms d'auteurs qu'elle cita ne lui étaient pas inconnus. Il avait lu Shakespeare, Ronsard et du Bellay - qu'il avait, d'ailleurs, préféré à Ronsard - ainsi que quelques tragédies des deux maîtres français.

"Oh, vous êtes très portée sur le tragique, dirait-on... Ronsard est un poète sexiste, je n'aime pas sa vision de la femme. Beaucoup trop pessimiste envers le temps...

Evidemment, quand on était vampire, le temps, on l'avait... et on pouvait sans remords ne pas manifester grand intérêt pour la flétrissure que le temps passant créait autour de lui...

"N'avez-vous pas lu Voltaire? ou Rabelais? Leur bonne humeur et leur ironie sont tellement plus croustillantes que les dilemmes parfois répétitifs de Corneille et Racine..."

La phrase d'Eleazar : "Qui vous dit que je veux juste la tuer?", intrigua Carlisle.
Elle était pleine de sous entendu, et il ne savait pas quoi en penser. Si Eleazar se rapprochait tant de cette femme, c'était pour son sang non ?
Carlisle ne connaissait pas suffisement Eleazar pour savoir ce qu'il avait dans la tête. Il ne se doutait pas qu'il aimait jouer avec les gens avant de les tuer pour leur sang. Cela ne lui viendrait même, jamais à l'esprit !

Carlisle se doutait comme même que son intervention et que toutes les paroles qu'il avait prononcés à l'intention du garde, intriguait Eleazar. Mais, l'écouterait il au final ? Allait-il suivre le conseil du jeune vampire blond ?
Carlisle n'était sur de rien.

- Vous ne vous seriez jamais approché de cette femme, vous ne lui auriez jamais adressé la parole si ce n'était pas pour la tuer et la vider de son sang.
A moins que vous ne lui voulez aucun mal... Mais j'en doute fortement. Très fortement.
Une aussi belle femme et un sang aussi attirant que le sien... C'est ce qu'on préfère.
C'est le plat préféré de tous les vampires, et je ne vous apprend rien en vous disant cela.

Carlisle se révélait sous son vrai jour. Il affirmait à Eleazar qu'il était un vampire en disant cela. Même si il se doutait que le garde des Volturi savait déjà qu'il était un vampire.
Sa couleur de peau, ses yeux, ses traits ne trompaient pas sur son identité.

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

Décidément, cette voix était vraiment stupéfiante. Grave, elle aurait pu faire passer cet homme pour le plus inhumain des hommes, mais ses intonations étaient telles qu'on aurait juré entendre une musique enivrante et apaisante. Cette berceuse déversait en plus un flot de paroles qui émoustillaient la demoiselle. Les hommes du XVIIIème siècle ne parlent que rarement de littérature, de politique, d'art avec les femmes. Celles de sa condition avaient droit à un minimum d'instruction, de considération et de respect, mais il n'en restait pas moins qu'on ne parlait pas de ces choses-là avec les femmes. Elles exécutaient leurs devoirs -devoirs maternels principalement, c'est à cela que servait les femmes- et c'était tout. Le travail que Morgane effectuait était déjà un exploit pour les jeunes femmes de son âge, et elle en était fière, mais on avait tendance à la considérer comme une machine à travailler. Alors quand un homme aussi séduisant que cet Eleazar Denali lui parlait de ce sujet qu'elle aime tant sans la prendre pour ce qu'elle était -une femme et rien d'autre-, la jeune Peterson se sentait terriblement bien. Et ces yeux... ces yeux-là ne pouvaient qu'être regardés avec attention.

"N'avez-vous pas lu Voltaire? ou Rabelais? Leur bonne humeur et leur ironie sont tellement plus croustillantes que les dilemmes parfois répétitifs de Corneille et Racine..."

Rabelais et Voltaire... Bien évidemment que cette littéraire confirmée les avait lu. Quoiqu'il était difficile de se procurer un ouvrage de Voltaire ces derniers temps en Europe. Les pays du vieux continent avaient peur de voir la révolution débarquer chez eux, et il fallait limiter au maximum les publications "à problèmes".

Et tout cela sans le quitter des yeux, sans que quoique ce soit ou qui que ce soit dans son champ de vision ne perturbe sa contemplation.

Tout cela amusait de plus en plus Eleazar. Les paroles du vampire blond lui tournaient lentement dans le crâne. Il cherchait à dissuader le vampire espagnol d’assouvir ses instincts, mais il ignorait sans doute quelle tête de mule pouvait être Denali… Bien sûr, cette charmante demoiselle était l’un de ses plats préférés… du moins, elle pouvait très bien l’être, ce n’était qu’une question de temps et du temps, Eleazar en avait à revendre ! S’il suffisait de trouver beau un humain pour décider de ne pas le vider de son sang, il y a des siècles que l’Espagnol ne se serait plus nourri que de nains, de mendiants et autres humains atteints de handicap physique ou social voyant. Mais le garde des Volturi avait plutôt bon goût et il rechignait à se rebattre sur de la qualité inférieure lorsqu’il y avait bien mieux… Un peu comme quelqu’un qui avait devant lui une côte de porc et du veau délicatement préparé… le choix était facile et logique.

"J’aime aussi m’amuser, señor, je ne l’ai jamais caché à personne. Cette jeune femme est tout simplement adorable et je m’en voudrais de ne pas lui faire partager certaines choses tant elle me semble mériter toute mon attention…"

Toujours aussi détaché, Denali savait déjà que les propos du vampire blond allaient le faire réfléchir. Mais il conservait cela dans un coin de son cerveau, car le moment n’était pas à la discussion éthique ou morale, d’ailleurs, jusqu’ici, l’autre vampire n’avait avancé aucune justification, aucun argument probant pouvant étayer les paroles dénuées de sens qu’il livrait à Eleazar. Et le garde des Volturi ne voyait pas où il voulait en venir, alors il jouait à cache-cache avec le fin mot de l’histoire…
Il était évident que Denali reviendrait vers ce vampire blond à un moment ou un autre pour en savoir plus. Mais pas maintenant. Non, il était occupé à ferrer sa proie et, aussi jolie fût-elle, aussi intelligente pût-elle être, aussi cultivée fût-elle, Eleazar la voulait, et peut-être même de plus en plus au fur et à mesure qu’il la découvrait à travers la littérature des Grands de ce monde.

La manière dont elle parla de Rabelais et de son utopie fit sourire légèrement le garde. Evidemment. Ce qu’Eleazar avait particulièrement aimé chez Alcofribas Nasier, c’était la richesse linguistique, les niveaux de langue tellement mêlés, les calembours et contrepèteries qui se retrouvaient aussi au fil des pages et puis, surtout, cette idée de l’éducation qui, bien qu’utopiste, n’était pas totalement à jeter.

"Fichtre, mais je ne suis pas du genre à forcer qui que ce soit à vivre dans un monde aussi marginal que celui de cette abbaye ! Il serait blasphématoire, d’ailleurs, d’obliger une jeune femme aussi charmante et docte à vivre dans quelque chose d’aussi systématiquement marginal…

Les femmes aimaient les compliments, surtout s’ils étaient sincères. Et là, il fallait bien avouer qu’Eleazar ne mentait pas. Il la trouvait vraiment instruite et pleine de charme. Et c’était rare à cette époque. Mais peut-être que de plus en plus cela arriverait ? Il y avait bien eu quelques femmes auteures, d’autres qui avaient mené des combats depuis les barricades et d’autres encore qui avaient participé à la vie politique de manière étonnante. Un jour, peut-être, les femmes gagneraient-elles la lutte pour ne plus êtres mises au ban de la société par quelques poignées d’hommes velus et atteints d’un complexe de supériorité dégradant pour leur sexe, au final.

"Vous savez, la confiance en l’homme impliquerait qu’il existerait un instinct naturel à bien faire, ce qui donne une large liberté à la conscience humaine… En cela, on pourrait rapprocher Rabelais de Jean-Jacques Rousseau et d’Emmanuel Kant… La bonne volonté des êtres humains est la base de toute société et il n’est pas besoin d’imaginer un monde aussi chaotique que celui du Candide de Voltaire pour constater à quel point le libre arbitre est un leurre… Aimez-vous les contes philosophiques de ce Français ?"

Le vampire amenait doucement la jeune femme à son piège. Il n’y avait plus tant de monde près de la fontaine, à présent que le soleil se couchait presque tout à fait. La chaleur retombait doucement, elle aussi, et il y avait fort à parier qu’une vague de fraîcheur ne tarderait pas. Alors, Denali proposerait son manteau à Morgane et il utiliserait encore un peu plus de ses atouts de prédateur pour se rendre indispensable à la Londonienne. Il la raccompagnerait dans les rues et il n’y aurait plus qu’à se montrer suffisamment intéressant pour que toute règle de bienséance s’évanouisse de l’esprit de la jeune Peterson. Eleazar n’aurait plus qu’à la suivre dans sa chambre et à faire ce qu’il voulait faire.

Les paroles d'Eleazar raisonnèrent dans la tête de Carlisle. Surtout les mots : "J’aime aussi m’amuser".
Alors comme ça il aimait jouer avec les gens avant de les tuer pour leur sang ?
Carlisle en était horrifié. Il ne s'attendait pas à ça de la part du Garde des Volturi.
C'est surtout qu'ils n'étaient pas sur la même longueur d'ondes visiblement. Eleazar ne faisait rien pour épargner des vies humaines. Au contraire. Il faisait tout pour les faire souffrir avant de les achever. Et ça, Carlisle ne le supportait pas.

- Vous torturez donc les gens avant de les vider de leur sang ?
Vous êtes ignoble Eleazar.

L'appellant par son prénom. Au point où ils en étaient !
Ils n'allaient surement pas tarder à faire de plus en plus connaissance. A moins qu'Eleazar ne renonce pas à cette jeune Londonienne. Ce qu'éspérait de tout coeur Carlisle.

- Je ne comprend pas comment vous pouvez faire autant de mal aux gens comme ça. Ne croyez vous pas qu'ils souffrent suffisement quand nous les tuons ?
Vous savez qu'ils ne meurent pas sur le coup, que notre venin est un poison qui fait plus qu'horriblement souffrir.

Carlisle avait gardé un très mauvais souvenir de sa transformation en tant que vampire. Il avait eu de la chance de s'en tirer sans que personne ne le remarque dans la rue sombre, à cette époque.
Il pensait avoir oublier, enfouit cette instant de sa vie bien au profond de lui. Mais non. Les mots d'Eleazar avaient marqué Carlisle et sa douleur, normalement profonde, avait ressurgit.

Le vampire Blond était maintenant en colère et hurlait à voix basse pour éviter que la jeune femme ne l'entende.

- Avez vous donc aimez votre transformation au point d'infliger de pareil souffrance ?
Imaginez un peu, mettez vous à la place de tous les gens que vous avez torturé. Cela à été encore plus horrible qu'une transformation de vampire.
Imaginez Eleazar ! Mettez vous à leur place 2 minutes ! Imaginez leur souffrance !
Et vous comprendez pourquoi je fais tout ça.

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

Le cadre florentin, la fontaine, cette conversation, cet homme... Tout l'enivrait férocement. De sorte que la respiration de Morgane s'accéléra. S'il l'entendait, Eleazar prendrait cela pour un effet du climat italien auquel elle n'était pas habituée sans aucun doute. Pourtant, avec la légère brise qui se levait lentement, elle ne devrait pas tarder à ressentir de légers frissons.
Il lui sembla que les yeux d'Eleazar trahissaient un certain sentiment de curiosité. Comme si cette conversation le ravissait lui aussi. Il n'avait pas l'air choqué de l'instruction de Morgane, bien au contraire. Celle-ci eut même l'impression qu'il en était heureux. Il avait réponse à tout, comme elle. Chaque chose qu'ils évoquaient leur parlaient à tous deux. Même l'abbaye utopiste de Rabelais lui avait parlé.

"Fichtre, mais je ne suis pas du genre à forcer qui que ce soit à vivre dans un monde aussi marginal que celui de cette abbaye ! Il serait blasphématoire, d’ailleurs, d’obliger une jeune femme aussi charmante et docte à vivre dans quelque chose d’aussi systématiquement marginal…

Perdue dans sa soif littéraire et dans les compliments qu'il venait de lui faire, la jeune britannique se rendit tout de même compte qu'elle s'était dangereusement et involontairement rapprochée de Eleazar. Gênée, elle le quitta des yeux pour la première fois depuis le début de leur conversation, baissant le regard vers ses mains en rougissant à nouveau et reculant son buste.

"Vous savez, la confiance en l’homme impliquerait qu’il existerait un instinct naturel à bien faire, ce qui donne une large liberté à la conscience humaine… En cela, on pourrait rapprocher Rabelais de Jean-Jacques Rousseau et d’Emmanuel Kant… La bonne volonté des êtres humains est la base de toute société et il n’est pas besoin d’imaginer un monde aussi chaotique que celui du Candide de Voltaire pour constater à quel point le libre arbitre est un leurre… Aimez-vous les contes philosophiques de ce Français ?"

Les mains de Morgane semblèrent soudainement très captivante. L'entendre dire qu'elle était charmante ne semblait peut être rien, mais il était rare qu'on lui dise de telles choses, et ces paroles étaient si douces aux oreilles de la jeune fille, qu'elle avait peur de trahir son émoi en le regardant plus longtemps.

- Vous flattez trop l'égo d'une demoiselle loin de son foyer, Monsieur Denali... Oui, j'aime Voltaire et ses contes. J'aime surtout son ironie, son mordant et son engagement. J'aime ce chapitre de Candide sur le nègre de Surinam, lorsque cet apprenti héros revient brutalement à la réalité des choses et que Voltaire montre à quel point les hommes sont différemment traités...

Décidément, Morgane se laissait bien aller sur ses opinions littéraires et politiques... Il était tellement rare qu'on lui demande ce qu'elle pensait des œuvres de ces philosophes de leur temps. La jeune fille eut soudain un léger rire et leva à nouveau les yeux vers Eleazar.

- Nous sommes bien loin de Pétrarque et de son amour pour la vertueuse Laure...

Comme elle l'avait prévue, la brise se fit sentir, révélant un frisson sur ses épaules. Morgane mit la main sur son voile, s'apprêtant à le remettre sur celles-ci.

Ce qu’ignorait Eleazar en discutant avec Carlisle, c’était que ce dernier était un petit comique. Oh, il ne le faisait sans doute pas exprès, mais l’Espagnol avait envie de rire en entendant ce que lui disait l’autre vampire. Pour qui le prenait-il, au fond ? Un sadique ? Certes, il y avait toujours eu un peu de cela en lui, mais tout de même, il y avait bien pire que lui dans le genre !
Denali s’entendit insulter et malgré tous ses efforts pour tenir deux conversations simultanément, il dut se rendre à l’évidence : il ne pourrait pas tenir le coup encore longtemps si le blond le prenait pour un salopard. Le temps avait fait son office depuis quelques siècles et le garde des Volturi s’était très nettement assagi. Pourquoi, dès lors, fallait-il qu’on ne retienne de lui que ses fort mauvaises actions passées ? Entre temps, il avait un peu changé, tout de même… Et puis, comment connaissait-il son nom, ce blondinet ? Eleazar sentit une vague de colère lui traverser l’échine et, bien malgré lui, cela dut forcément se peindre sur ses traits ou, à tout le moins, dans ses yeux.
Il détourna la tête un instant vers l’autre vampire pour lui signifier quelque chose :

"Soyez ici dans un quart d’heure, nous aurons à parler."

C’était sans appel. Et si son ton laissait entendre son courroux, il tâcha de se recomposer un visage moins farouche, puis, il revint à la demoiselle.
Celle-ci regardait ses mains avec un intérêt non dissimulé. Eleazar espéra qu’elle n’avait guère vu son changement de tempérament de ces dernières secondes, mais il ne se fiait jamais trop à l’espoir, sachant très bien que rares sont les espérances qui ne sont pas déçues.

La jeune Anglaise semblait gênée, comme si elle n’avait pas mérité l’attention du vampire. Et ce dernier, pourtant, restait persuadé du contraire. Alors qu’elle lui parlait encore de Voltaire, il réfléchissait à toute vitesse à ce que l’autre avait dit. Il le prenait pour un autre, ce n’était pas possible autrement. Eleazar n’était pas de ceux-là. Il ne tenait pas à faire souffrir, pas plus qu’à brutaliser, d’ailleurs, c’était bien pour cela qu’il agissait tout en douceur, pour permettre aux humains qu’il choisissait d’être mis en confiance et de ne pas avoir à subir la peur de leur vie juste avant de mourir. Il y avait longtemps qu’il s’était lassé de la traque et du plaisir éphémère qu’elle procurait. Quoi qu’il en soit, il fallait maintenir la conversation pour conserver son image, à présent.

"Effectivement, c’est un passage particulièrement riche de sens, qui pousse à la réflexion même le plus abrupt des hommes… Mais les mots de Voltaire vis-à-vis de l’esclavage m’ont paru moins forts que ceux de Marivaux qui est peut-être plus engagé encore dans le combat contre les inégalités… Voyez, par exemple, à quel point La Colonie défend l’égalité entre hommes et femmes ! La Révolution de France était en germe depuis quelque temps déjà dans la littérature…"

Denali sourit en écoutant Morgane dire qu’ils étaient loin à présent de Laure et Pétrarque. Ce n’était pas faux, bien sûr. Mais il ne prit pas la peine d’en rajouter. La demoiselle, frissonnante, avait levé la main pour remettre son voile. Il avança la sienne pour remettre le tissu convenablement, d’un geste sûr et précis, avant qu’elle n’eût le temps d’esquisser plus avant son mouvement.

"Il commence à faire frais, mademoiselle Peterson, vous allez prendre froid si vous restez là…
Me permettez-vous de vous proposer de vous accompagner jusque votre logis ?"

Eleazar avait fait attention de ne pas effleurer la peau de la jeune fille, le contact de la froideur de la sienne aurait éveillé des craintes dans l’esprit de n’importe quelle personne un peu sensée. Ce qu’était assurément la Londonienne.

Etre ici dans un quart d'heure ? Pourquoi faire ? Il serait trop tard pour la jeune londonnienne.
Carlisle voulait riposter, mais la réponse d'Eleazar était sans appel. C'était plus un ordre qu'autre chose.
Mais bon, Après tout, qu'est ce que Carlisle avait à perdre en ripostant ? Rien. Eleazar n'allait surement pas l'attaquer devant la jeune londonnienne. Ce serait trop risqué.

Le jeune vampire blond attendit alors qu'Eleazar est fini de parler à la jeune femme et avant que celle ci réponde, Carlisle dit :

- Dans 15 minutes ? Et pourquoi faire ?
Je suis ici pour vous empêcher de torturez et de tuer quelqu'un de bien. Pas pour autre chose.

Le temps sembla se presser d'un coup pour Carlisle. Entendre les dernières paroles d'Eleazar envers la jeune femme était une véritable torture. Le garde des Volturi voulait emmener Morganne pour la tuer. Et Carlisle se sentait impuissant. Que dire de plus ? Qu'est ce qui pouvait faire changer d'avis Eleazar ?
Carlisle eu soudain une idée. Il s'empressa d'ajouter :

- Et si les humains n'étaient pas que le seul plat des vampires ?

Que voulait dire cette phrase ? Seul Carlisle en savait la signification. Il l'avait lancé pour gagné du temps, se doutant bien que cette phrase allait attirer l'attention d'Eleazar.

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

A peine Morgane avait-elle posé la main sur son étole qu'Eleazar, d'un mouvement vif -qu'elle prit pour un geste tendre et doux à la fois-, réajusta le tissu sur les épaules de la jeune anglaise. Il n'effleura pas une seule fois sa peau. Cet homme était un véritable gentleman. Un homme qui semblait sain d'esprit. Un homme gentil et intelligent. Et ce geste si doux envers une inconnue la fit plonger à nouveau dans la contemplation de ses yeux, de son visage si surprenant.

Morgane n'avait pas l'habitude qu'on lui prête autant d'attention. Et pourtant c'était une sensation bien agréable, qu'elle espérait vivement retrouver un jour d'ailleurs. Cependant, dans sa profonde contemplation de l'un des plus beaux visages qui lui ait été donné de voir, la jeune femme vit dans son regard un étrange éclat. Elle crut d'abord à de la colère, mais qu'est-ce qui avait bien pu faire ressentir pareil sentiment à cet homme si charmant? Non, ça ne devait décidément pas être de la colère... Et pourtant, elle avait bien vu que pendant un cour instant, une fraction de seconde seulement, il avait ressenti autre chose que de l'intérêt pour leur conversation.

"Il commence à faire frais, mademoiselle Peterson, vous allez prendre froid si vous restez là…
Me permettez-vous de vous proposer de vous accompagner jusque votre logis ?"

Alors ce n'était pas de la colère, elle en était bien sûre à présent. Lui souriant, elle comprit qu'il la congédiait. Peut-être en avait-il assez de discourir de littérature avec une femme. Mais il n'en restait pas moins charmant, il n'était pas brute dans sa façon de la renvoyer chez elle. Eleazar était plus que courtois. L'agacement -car c'était cela qu'elle avait vu- qu'il ressentait ne l'empêchait pas de faire preuve de la plus grande politesse qui soit.

Il n'était pas habituel pour une jeune femme de bonnes conditions de se laisser reconduire ainsi chez elle. Mais la compagnie de cet homme lui plaisait, et elle-même ne voulait pas paraître discourtoise. Lentement alors, elle se leva, serrant les deux pans de son voile au creux de sa main droite et se tournant à présent complètement vers lui. C'est à ce moment là que Morgane reprit conscience du monde qui les entourait, voyant deux hommes discutant d'une manière un peu trop vive à quelques mètres d'eux, une femme assise sur le sol, en haillons qui regardait les passants d'un air implorant, et un autre homme blond, assis sur le rebord de la fontaine lui aussi, à peine à quelques mètres de là. Il avait certainement entendu toute la conversation de Morgane et d'Eleazar.

- Vous avez raison Monsieur Denali, il doit être temps que je rentre. J'accepte volontiers.

Avec tout ça, Eleazar ne savait pas vraiment dire si c'était le fait que le vampire blond ait fait usage de son prénom ou si c'était parce qu'il le prenait pour un sadique qu'il s'était soudainement senti agressé par cette présence. Certes, il s'agissait d'un type bien élevé et tout ce qu'on voulait, mais il avait une fâcheuse tendance à se mêler de ce qui ne le concernait pas et ça, rien que ça, ça avait le don d'énerver Denali plus encore que le clabaudage des humains imbéciles qui ne connaissaient rien à rien et qui faisaient mine de tout savoir. C'était horripilant à un point indicible.

Bref, Eleazar ignora royalement les propos de Carlisle, quoiqu'il les eût, évidemment, entendus. Il ne savait pas ce qu'il disait ce petit roquet, c'était indéniable. Et lui, le garde des Volturi, avait toutes les cartes en main pour écraser le roquet comme un vulgaire cancrelat. Ah, il verrait bien ce que devenait la colère contenue chez un vampire aussi caractériel que Denali.

L'espoir de vengeance était ce qui animait le plus souvent les sentiments du vampire en cet instant précis. Il savait qu'il reviendrait voir ce blondinet et que la conversation n'aurait plus rien de discret, loin de là. Des mots seraient lâchés, des phrases irrécupérables et des propos tendancieux. Les joutes verbales avaient son charme et cette seule perspective avait eu raison d'autre chose en Eleazar.

Au fur et à mesure qu'il avait discuté avec Morgane Peterson, il avait découvert une demoiselle hors du commun. Non seulement elle était physiquement exceptionnelle, mais sa conversation ne l'était pas moins. Le geste que le garde avait eu pour remettre en place l'étoffe légère sur les épaules de la jeune fille avait été comme un test qu'il se faisait passer à lui-même. Et dès cet instant, sa décision était prise.

Comme elle se levait après l'avoir regardé, un peu différemment, mais il était clair que les humains avaient cette ignorance de la lecture des émotions dans les yeux (quoique...), il fit de même et, après un regard plein de mépris pour le blond roquet, Eleazar esquissa un petit sourire à l'attention de son interlocutrice.

"Merci pour votre confiance, mademoiselle Peterson, soyez certaine que je me montrerais d'excellente compagnie et qu'aucun de ces badauds mal intentionnés ne pourra vous approcher."

Les paroles qu'il prononçait, il avait besoin de s'entendre les dire. Il était le protecteur de la jeune femme pour tout le temps que durerait le trajet la menant chez elle. Ensuite, il verrait bien. La fraîcheur du soir tombant fut la première chose contre laquelle le vampire estima qu'il fallait protéger la demoiselle. Alors, il ôta son long manteau de laine pour le poser sur les épaules fragiles et délicates qui ne méritaient pas d'avoir à subir les assauts du froid naissant. Lui, il portait un sobre costume sombre, à la mode de Versailles... Sobre, mais élégant, est-il besoin de le préciser.

Il proposa son bras à la demoiselle avec une attitude peut-être un peu théâtrale, mais l'intention y était. Le coeur aussi, sans doute. Denali était certes de bonne éducation, à présent que sa fougue meurtrière des premiers temps s'était calmée, mais il fallait toujours prendre tout un tas de précautions et cela, c'était parfois complexe. Ici, par exemple, Eleazar avait présenté son bras en tâchant évidemment de ne pas exposer la moindre parcelle de sa peau froide au toucher potentiel de Morgane. Un incident est si vite arrivé...

Après quelques pas, il crut bon de s'excuser en partie.

"Pardonnez-moi cette brusquerie, mais cet homme nous écoutait depuis un moment, j'en suis convaincu et cela me dérange... Les gens sont parfois tellement indiscrets..."

Du haut de son mètre quatre-vingt-huit, le vampire contemplait les traits de son interlocutrice. Assurément, tant de savoir dans une tête féminine ne devait pas plaire à tout le monde et il valait mieux ne pas exposer cette jeune femme à ce genre de dangers. Il y en avait tant d'autres dans ce monde...

•PNJ• Nombre de messages : 25 Date d'inscription : 26/01/2009

Attristée à l'idée de l'ennuyer, Morgane regarda Denali se lever. Elle n'avait pas remarqué à quel point il était grand. Toute cette hauteur ne lui donnait que plus de prestance , plus de carrure. La jeune femme se dit qu'elle devait lui paraître bien frêle et bien fragile à côté de lui et de sa silhouette si imposante. Le haut de sa tête n'arrivait qu'aux épaules d'Eleazar, ce qui était en soit impressionnant et en disait long sur la petite taille de la demoiselle. De plus quel âge avait cet homme? Il semblait bien plus âgé qu'elle, peut être près des trente-cinq ans, et pourtant, il paraissait en pleine forme, plus encore qu'elle c'était certain.

Morgane commençait à le trouver plein de mystères, plein de secrets inavoués. Etait-elle face à un Valmont? Joueur et charmant à la fois! Où était-ce un Monsieur de Nemours? Bien élevé, pieux et fidèle! La londonienne était intriguée par un tel personnage tout droit sorti d'un roman. D'autant plus qu'elle vit à nouveau un regard hargneux sur son visage. Mais il ne lui était pas destiné. Il avait un instant tourné la tête vers l'homme blond assis près d'eux à la fontaine. Etait-il possible qu'il avait écouté toute leur conversation? Elle n'avait pourtant rien de particuliers, deux étrangers parlant littérature dans une autre langue que celle couramment parlé à Florence. Morgane fut cependant soulagée de le voir lui adresser un sourire une fois retourné vers elle à nouveau.

"Merci pour votre confiance, mademoiselle Peterson, soyez certaine que je me montrerais d'excellente compagnie et qu'aucun de ces badauds mal intentionnés ne pourra vous approcher."

La jeune femme esquissa un nouveau sourire dissimulant sa réaction première qui fut le rire nerveux. Ainsi il estimait qu'elle courait un danger à rentrer seule chez elle. Ou était-ce de la politesse à l'état pur? Elle n'aurait su dire, mais ce regard si vif la transperçait de toute part...

L'homme eut alors deux gestes délicats. La douce fraîcheur florentine du soir commençant à se faire sentir, Denali se débarrassa de son long manteau de laine noir pour le poser délicatement sur les épaules de Morgane, recouvrant ainsi la robe rose pâle en soie de la jeune fille. Il fit ensuite quelques pas et d'un geste quelque peu exagéré -même pour leur condition à tous deux-, lui proposa son bras pour la raccompagner. L'une comme l'autre des deux attentions firent sourire timidement la jeune fille. Combien de fois depuis le début de cette rencontre avait-elle rougi ou souri? D'un geste lent, Morgane accepta son bras, et se mit à marcher à ses côtés. A peine avaient-ils fait quelques pas, que Denali reprit la parole sur un ton désolé.

"Pardonnez-moi cette brusquerie, mais cet homme nous écoutait depuis un moment, j'en suis convaincu et cela me dérange... Les gens sont parfois tellement indiscrets..."

Ainsi l'homme blond les avait bien écouté et Denali s'en était aperçu. Morgane se demanda comment car il n'était pas tourné vers lui... Mais qu'importait... Elle se laissait guider par sa démarche lente et gracieuse, se sentant légèrement gauche.

- Il n'y a pas de mal, Monsieur Denali... Puis il se fait tard, je peux comprendre que vous deviez rentrer vous aussi.

Ils continuaient de marcher, assez lentement. Morgane se sentait étrangement en sécurité avec cet homme. Mais c'était bientôt l'heure de la séparation. Ils approchaient presque de sa demeure. Elle leva légèrement le doigt pour pointer une direction.

- Vous voyez cette rue qui mène à droite? J'habite au bout de celle-ci. C'est la maison du colonel Peterson... Mon père...

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